Voici un extrait, tiré de ma toute première comédie romantique. L’idée a germé dans mon esprit, il y a une dizaine d’années maintenant, autour d’un thé et d’une discussion animée avec Audrey, ma sympathique belle-sœur bretonne. Et de fil en aiguille les premiers jets de Rosie et de son brun ténébreux ont commencé à émerger des abysses de mon cerveau !
Le roman est en cours de relecture, correction et réécriture en ce moment. Je ne l’ai pas tout à fait terminé, mais ça ne saurait tarder ! Il faudra encore qu’il repasse par des relectures, corrections, etc. après le point final. Mais, si tout va comme je le souhaite, le roman devrait sortir en fin d’année. Je croise les doigts !
Je vous mets un extrait du chapitre 3. N’hésitez pas à me donner votre avis lorsque vous l’aurez lu. Je suis preneuse de tout commentaire et suggestion.
“Au bon pain de Gégé” boulangerie-pâtisserie de Vouvan-les-forêts
3
— Hé ! Salut, Rosie. Merci pour l’invitation. Tiens !
Ambre pénètre dans le vestibule, suivie d’Érin, me plante une bise sur la joue, et me fourre dans les mains une bonne bouteille de Bordeaux et un paquet de gressins à l’ail et aux herbes.
— Les enfants sont là ? s’enquiert-elle sans me laisser le temps de la remercier, les cherchant du regard tout en suspendant sa veste en cuir sur le porte-manteau fixé sur le mur, juste à l’entrée.
Elle prend ensuite la direction du salon et je réponds en haussant le ton pour qu’elle m’entende, un grand sourire aux lèvres :
— Sûrement là-haut, dans leur chambre, finissant leurs devoirs.
Ça y est ! Il suffit que mes deux amies passent la porte pour que je me sente déjà nettement mieux. La positivité d’Ambre est définitivement contagieuse. C’est un véritable rayon de soleil !
Je ferme le battant et me tourne vers Érin, que je prends dans mes bras et embrasse sur les deux joues.
— Je suis heureuse que vous ayez pu venir, je lui avoue, un soulagement palpable dans la voix. J’ai du lourd à vous raconter.
Érin comprend aussitôt à quoi, et à qui surtout, je me réfère et lève les yeux au ciel en faisant la grimace. Ça commence bien ! Elle se défait de sa veste en jean en me regardant du coin de l’œil, intriguée, et je l’invite à passer dans la salle-à-manger, où sa joviale compagne nous attend déjà. Tout en l’escortant, j’ajoute tout bas à son oreille à mes risques et périls :
— Je vais avoir besoin de tes conseils avisés en urgence. C’est de la grosse artillerie, cette fois !
— C’est ce que j’ai cru saisir. Qu’est-ce qu’il a encore fait mon monsieur-balai-dans-le-cul préféré ?
Tout à coup, Érin s’arrête net, me prend fermement les épaules, plisse les yeux et sonde les miens avec intensité en fronçant les sourcils. Comme lorsqu’elle essaie de percer le fond des pensées de ses interlocuteurs. Je déteste quand elle fait ça.
— Putain d’merde, Rosie ! lance-t-elle soudain avec son tact habituel, me faisant sursauter, vu que je m’étais un peu perdue dans l’émeraude de ses beaux yeux hypnotiques. Ne me dis pas qu’il te plaît, cet abruti ?
Quoi !? Elle est folle ! Je ne lui ai encore rien dit et elle en conclut que j’ai ce sale type dans le collimateur ! C’est quand même extraordinaire !
Comment Érin peut-elle me demander une telle chose ? Ne serait-ce même que l’envisager ? Elle a des dons de voyance et elle voit le futur ? Parce que là, moi, à cet instant précis, à part attester que Maximilien-je-me-la-pète m’insupporte, je suis bien incapable de dire s’il pourrait m’inspirer assez de sympathie un jour pour m’amener à ressentir d’éventuels sentiments amoureux envers sa personne. Et voici que ma meilleure amie me jette à la figure si j’ai de l’intérêt pour ce mec !
Sans perdre une minute, je m’empresse de lui faire savoir oralement que sa question m’insurge au plus haut point.
— T’es malade ! Qu’est-ce que tu vas chercher !
Brusquement, Érin me fait les gros yeux et je sens soudain une présence derrière moi. Je comprends aussitôt le message. Je tourne les talons, un sourire trompeur fiché sur le visage.
Mon fils, à quelques centimètres de moi, un bol de chips dans une main, une énorme chips dans l’autre, qu’il enfourne aussitôt dans sa bouche la mastiquant bruyamment, nous observe Érin et moi d’un œil suspicieux, un sourcil levé. Je me demande toujours où il met tout ce qu’il ingurgite en dehors des repas. Lui qui est si menu, avec ses longues jambes de sauterelles !
À tout juste onze ans, Sami ne pèse que 41 kilos pour une taille bien au-dessus de la moyenne : 1 m 61. (Son père est très grand ; ceci explique sûrement cela.) Sur ordre du médecin, je ne dois pas du tout m’inquiéter, dramatiser ou faire une fixation sur son poids. Ce qu’il pourrait mal prendre à la longue et lui créer des complexes. Une batterie d’analyses a, d’ailleurs, confirmé que Sami n’a aucun souci de santé particulier. En revanche, je l’emmène régulièrement chez le médecin pour un contrôle. Le reste du temps, je le laisse évoluer à son rythme. Je lui permets de manger tout ce qu’il veut quand il le veut, et il ne s’en gêne pas. Si ça peut le remplumer un peu plus, moi, ça me va ! Je sais que la plupart des mères empêchent leurs enfants de grignoter avant les repas : ce n’est définitivement pas mon cas.
— C’est qui monsieur-balai-dans-le-cul, maman ? m’interroge-t-il le plus innocemment du monde, plantant ses beaux yeux marron-chocolat dans les miens.
Je me racle la gorge mal à l’aise. J’ai l’impression d’avoir été prise en flagrant délit de je ne sais quoi.
— Euh…
— Hey ! coucou, Sam ! lance aussitôt Ambre venant à ma rescousse, s’approchant de lui. T’as encore grandi toi, non ?
Merci Ambre ! Je te le revaudrai !
Son intervention me laisse quelques secondes pour me remettre de mes émotions et reprendre contenance devant progéniture.
— Bonjour, Ambre ! Bonjour, Érin ! répond Sam d’une politesse exemplaire, le sourire jusqu’aux oreilles tant il a l’air heureux de les voir à la maison.
Bon, au moins, il est à moitié bien élevé, ce gosse ! clame mon for intérieur. Je n’ai pas tout loupé, visiblement.
Avec la nonchalance de tous les ados et toujours son bol de chips greffé dans la main, Sami s’approche des filles et les embrasse. Puis, il se rabat à nouveau sur moi, affichant un visage impassible. Il me scrute, inquisiteur, attendant une réponse à sa question de tout à l’heure.
Hum ! Il ne perd pas le Nord, le saligaud !
Voilà ce que c’est que d’apprendre à ses enfants à être persévérants. À ne jamais abandonner avant d’avoir obtenu gain de cause.
— Personne ! je me hâte de rétorquer toujours embarrassée. Un type, au boulot. Et ne parle pas comme ça ! Je t’interdis de dire des grossièretés dans cette maison !
— Pourquoi ? me répond aussi sec l’effronté. Elle en dit bien, Érin ! Et pas qu’un peu !
Il ricane et j’entends Ambre étouffer un petit rire à son tour. Je la fusille du regard.
— Parce que c’est comme ça ! Voilà pourquoi ! je réplique affrontant cette fois le regard de mon Sami.
Ouais, OK ! je vous le concède, ma réponse n’est pas très recherchée. Mais qu’est-ce qu’ils peuvent être chiants, ces gamins, avec leurs questions à la noix ! Et patati et patata… Et pourquoi ceci ? Et pourquoi cela ?… Et pourquoi pas, d’abord !
— Ça n’a rien à voir ! Érin est une adulte… j’ajoute, m’empêtrant davantage.
— Ah, d’accord ! surenchérit à nouveau mon fils qui a oublié d’être idiot. Si je te suis bien, quand je serai adulte, je pourrai dire autant de gros mots que je veux, c’est ça ?
Petit con, va ! je pense très fort. Continue à faire le malin avec ta mère et tu vas voir un peu !
— Euh… non, je lui réponds. Ce n’est pas ce que je voulais dire. Ce que je dis, c’est que… Oh, et puis, zut ! T’as pas à écouter les conversations des grandes personnes. T’as fini tes devoirs ? j’aboie, ce coup-ci.
— Yep ! J’peux jouer à la Play maintenant, S.T.P ?
— S.T.P ? Et qu’est-ce que ça veut dire ça ? je demande, exaspérée.
— Ben… s’il te plaît ! répond-il grimaçant et en haussant les épaules comme s’il s’agissait de l’évidence même.
Je lève les yeux au ciel. Les jeunes actuels ! Même plus foutus de parler correctement ! Plus ça va, plus ils s’adressent à leurs interlocuteurs sous forme de rébus et de mimes. M.D.R. pour : mort de rire. T.G. pour : ta gueule. (J’ai appris ça, il y a peu.) Et maintenant, S.T.P… Et puis quoi, encore ! Bientôt, il nous faudra avoir recours à des scientifiques spécialistes en déchiffrage de codes secrets, ou à des ingénieurs experts de la NASA, pour pouvoir décoder leurs dialogues !
Néanmoins soulagée de pouvoir avoir un petit instant de tranquillité avec mes copines, je riposte avec douceur, tout à fait calmée à présent :
— Pas longtemps alors, mon chéri. Le temps que je finisse le repas.
Faut bien feindre de taper du poing sur la table quand il le faut devant descendance, non ? Sinon, comment comprendrait-elle qui est le boss ?
— YES ! Merci, m’man ! rétorque-t-il, ne pouvant refréner ce petit sourire victorieux que je lui connais si bien.
Il est tellement craquant quand il sourit, avec ses deux fossettes qui lui creusent les joues, qu’on lui donnerait le bon Dieu sans confession. Il se tourne ensuite vers Ambre, la suppliant du regard.
— Tu joues avec moi, tata ?
Depuis sa petite enfance, Sam a pris l’habitude d’appeler Érin, tata. Et quand Ambre a débarqué dans sa vie, elle y a eu droit aussi. Il faut dire que, même si elles et moi n’avons aucun lien de parenté, ce sont les seules tantes que je ne pourrai jamais offrir à mes enfants. (Je suis fille unique.) Et, heureusement pour tout le monde, ils en sont fous ! (Mia et Samuel ont bien trois vraies tantes du côté paternel, mais ils ne les voient pas très souvent. Pas aussi fréquemment qu’ils côtoient Érin et Ambre, j’entends.)
— Avec plaisir, mon grand ! réplique-t-elle, ravie.
— Avant, Sami, monte dire à Mia que nos invitées sont là, s’il te plaît ! Je suis étonnée qu’elle n’ait pas encore montré son joli minois. Elle doit encore avoir ses fichus écouteurs sur les oreilles…
— Bien sûr, m’man ! me lance mon fils, conciliant, s’exécutant aussitôt.
Hum… Pas normal qu’il soit aussi accommodant, je pense tout à coup, méfiante.
D’ordinaire, je suis obligée de lui demander plusieurs fois avant qu’il se décide à faire ce que je lui demande. Samuel réagit rarement au quart de tour comme ça. Surtout quand il est occupé à autre chose. Qu’est-ce que ça cache ?
Je le vois se précipiter sur les marches de l’escalier à deux pas et les escalader à la vitesse de l’éclair. Peut-être est-il tout simplement pressé de se débarrasser de cette corvée pour aller s’amuser avec sa tante ? Je me détends sous l’effet de cette idée, pour me tendre comme la corde d’un arc la seconde d’après en songeant qu’il a peut-être tout bonnement envie d’aller enquiquiner sa sœur, (ainsi qu’il prend plaisir à le faire ces derniers temps, elle qui tombe systématiquement à pieds joints dans ses moqueries), alors je lui crie :
— Et n’oublies pas de frapper à sa…
Mais je n’ai pas le temps de finir ma phrase que j’entends déjà Mia hurler :
— Non, mais, ça va pas, non ? SAMIII ! On t’a pas appris à frapper avant d’entrer, espèce de troll ? Tu m’as foutu la trouille ! Dégage de ma chambre avant que j’te claque, merdeux !
Un grand soupir, deux grommellements et un claquage de porte plus tard, je prends momentanément congé de mes amies pour foncer régler le problème. Quelques minutes après, je redescends, précédée d’un Sam penaud et d’une Mia boudeuse.
Quand ma fille aperçoit ses tantes, son visage se radoucit et s’illumine instantanément, faisant s’envoler sa mauvaise humeur. Leurs caractères se ressemblent ; elles sont toutes les trois extraverties, un sourire perpétuel aux lèvres. La plupart du temps. Un peu folles sur les bords, quoi ! (Et les bords sont larges !) Aussi, comme à l’accoutumé, les embrassades se terminent en chahut. À regret, pourtant, Mia les abandonne très vite ensuite pour aller terminer ses devoirs. Elle compte profiter sereinement d’elles le reste de la soirée.
Si ma fille apprécie particulièrement de s’amuser, elle est aussi d’un sérieux exemplaire concernant ses études. Mia est en Première L au lycée Ernest Hemingway de Plounéac. C’est une jeune fille intelligente (et je ne dis pas ça parce que c’est ma fille : QI supérieur à la moyenne), très autonome, qui adore rire et plaisanter. Or, en contrepartie, elle est également très appliquée et réfléchie. Bien sûr, elle a ses mauvais jours, comme tous les jeunes de son âge. Mais ils sont si peu nombreux que, franchement, je ne me formalise pas lorsqu’elle pète une durite.
Pour l’instant, je n’ai donc aucun souci majeur avec Mia et j’espère que cela va continuer sur cette voie. Nous parlons beaucoup, alors cela facilite la communication et la compréhension entre nous. Et cette complicité entre mère et fille, c’est précieux pour moi ! J’aime par-dessus tout ces moments privilégiés que nous passons à discuter de tout et de rien, refaisant le monde. Elle me fait régulièrement des comptes rendus sur ce qui se passe dans son lycée, me parle de ces amoureux transis, ces crétins-immatures comme elle les appelle, qui ne cessent de lui courir après, mais dont elle se désintéresse totalement… Je n’échangerai pour rien au monde ces instants. Même pour tout l’or de la Terre.
Côté physique, nous nous ressemblons beaucoup également. Même couleur de cheveux châtain foncé, mêmes yeux noisette, mêmes pommettes saillantes, mêmes taches de rousseur… Et nous sommes aussi petites l’une que l’autre. Mia mesure deux centimètres de plus que moi, néanmoins. (Elle y tient !) De plus, elle a de magnifiques cheveux bouclés qu’elle porte à mi-dos. Elle les a autant bouclés, d’ailleurs, que son frère et moi les avons raides. Elle est menue avec de jolies formes bien placées… En gros, elle est belle, ma fille ! Et en plus, c’est un amour !